Nombre de propriétaires se trouvent confrontés à des locataires qui ne payent pas les loyers. Deux situations différentes sont fréquentes :

  • Un locataire, de bonne foi, rencontre temporairement une situation financière difficile. Dans ce cas, il en averti en principe le bailleur et il est recommandé de rattraper le retard de loyer via un échéancier qui sera négocié entre les deux parties. Ainsi, il est probable qu’en quelques mois tout soit rentré dans l’ordre. Si une des échéances n’est pas respectée, il conviendra de procéder à un commandement de payer par voie d’huissier afin de protéger vos droits.
  • Un locataire, de mauvaise foi, arrête de payer les loyers sans raison particulière. Le propriétaire ne devra pas se laisser abuser et devra se montrer ferme dès le premier manquement. Deux cas principaux :
    • Le propriétaire vient de donner un congé au locataire pour vendre ou habiter les locaux loués (Art.15 de la loi du 6 juillet 1989). Celui-ci en représailles cesse de payer les loyers. Le locataire essayera vraisemblablement de gagner du temps et vous fera miroiter un éventuel payement à venir ainsi qu’un départ. Dans ce cas, il est nécessaire d’agir tout de suite car la situation ne pourra que s’envenimer sur un plan financier et, pire encore, le locataire pourrait ne pas quitter les lieux ou quitter les lieux sans vous donner sa nouvelle adresse, ce qui compliquera les poursuites judiciaires.
    • Le propriétaire décide de ne pas payer les loyers car il n’en a pas envie ou n’en a plus les moyens mais ne propose aucune solution.

Légalement, il suffit d’un seul retard de paiement du loyer et/ou des charges pour constituer un impayé.

Dans un premier temps, une phase amiable sera privilégiée. Le propriétaire pourra mettre en demeure de payer par lettre recommandée avec accusé de réception le locataire. En cas d’échec, le propriétaire se rapprochera d’un huissier qui délivrera un commandement de payer visant la clause résolutoire (si le contrat de bail contient une clause résolutoire).

Pour mémoire, une clause résolutoire permet la résiliation automatique du contrat en cas de manquement à une obligation contractuelle par l’une des parties. Ainsi, lorsqu’une clause résolutoire est insérée dans le contrat de bail, le juge ne peut que constater la résiliation du bail deux mois après que le commandement de payer ait été signifié. Il est donc vivement recommandé aux bailleurs de veiller à insérer une telle clause dans le contrat de bail.

Si dans le délai de deux mois, aucun payement n’est intervenu, il sera nécessaire d’assigner le locataire par devant le Tribunal d’instance du lieu de situation de l’immeuble pour obtenir le paiement des sommes dues et l’expulsion du locataire indélicat. Bien que le code de procédure civile ne requière pas la représentation obligatoire par un avocat, il est tout de même fortement conseillé de s’entourer des services d’un conseil. En effet, l’argumentaire à développer et la procédure à respecter doivent répondre précisément à certaines règles. A défaut, la procédure ne sera pas valide et le juge rejettera les prétentions du propriétaire même si celles-ci sont réelles. Parallèlement à la procédure par devant le Tribunal d’instance, le Préfet ainsi que la CCAPEX[1] devront être informés. Entre la saisine du juge et l’obtention de la décision de justice, il s’écoule en général entre 6 et 12 mois.

Une fois le jugement obtenu, si votre ancien locataire n’exécute pas spontanément la décision, il sera nécessaire de recourir à un huissier afin de délivrer un commandement de quitter les lieux le cas échéant et procéder aux saisies qui s’imposent. Si besoin est le concours de la force publique sera requis.

Il peut arriver que soit refusé le concours de la force publique. Il s’agit alors d’une position très désagréable pour le propriétaire qui doit encore faire une démarche afin que l’Etat paye une indemnité égale aux loyer et charges dues par l’occupant sans droit, ni titre et ce, jusqu’à ce que celui-ci quitte les locaux.

Enfin, il est à noter que le dépôt de garantie a pour fonction de couvrir d’éventuels manquements du locataire (loyers ou charges impayés, réalisation des réparations locatives…). En aucun cas, il ne peut être utilisé par le locataire pour compenser les loyers impayés.

Estelle FORNIER

Avocats à la Cour

[1] Commissions départementales de coordination des actions de prévention des expulsions locatives.