La loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (dite aussi « loi SRU ») a instauré un dispositif protecteur de l’acquéreur non professionnel d’un immeuble d’habitation codifié aux articles L.271-1 et L.271-2 du Code de la construction et de l’habitation.

Il est nécessaire de délimiter précisément le champ d’application de ce dispositif (I) avant de s’intéresser à son régime (II) et à la sanction du non-respect de ces articles (III).

I – Le champ d’application

Afin de pouvoir bénéficier du dispositif, il faut cumuler les conditions suivantes :

  • Etre un acquéreur non professionnel : c’est-à-dire un particulier et non pas : une société, un marchand de bien, un loueur professionnel.

A noter que la jurisprudence a refusé qu’une SCI puisse bénéficier de ce délai au motif que son objet social était « l’acquisition, l’administration et la gestion par location ou autrement de tous immeubles et biens immobiliers meublés et aménagés » et « que l’acte avait un rapport direct avec cet objet social » (Cour de cassation, chambre civile 3, 24 octobre 2012, N° de pourvoi : 11-18774).

  • Acquérir un immeuble d’habitation : cela peut être une résidence principale, secondaire ou encore un investissement locatif tant qu’il ne s’agit pas d’une activité professionnelle pour l’acquéreur.

N’entrent pas dans le champ d’application les immeubles à usage mixte par exemple habitation et commerce (Cour de cassation, chambre civile 3, 30 janvier 2008, N° de pourvoi : 06-21145).

Les locaux accessoires tels que les garages, la cave, le cellier ne sont pas strictement à usage d’habitation. Toutefois, lorsque la vente intervient en même temps et entre les mêmes parties que l’immeuble d’habitation, l’article L.271-1 du Code de la construction et de l’habitation s’applique. Tel ne serait pas le cas pour la vente d’un garage seul.

L’usage du local doit être apprécié non pas en fonction des caractéristiques physiques de l’immeuble mais en fonction de l’usage que l’acquéreur prévoit d’en faire. Par exemple, si un acquéreur achète un appartement à usage d’habitation pour ensuite l’utiliser comme bureau pour son activité alors il n’y aura pas de délai de rétractation.

  • Acquérir via un contrat de promesse ou un contrat de vente : les promesses unilatérales de vente ou synallagmatique, les contrats de vente lorsque la vente n’est pas précédée d’un avant contrat entrent bien évidemment dans le champ d’application.

En revanche, les ventes par adjudication ne permettent pas à l’acquéreur de bénéficier du délai de rétractation.

II – Le délai

L’article L.271-1 prévoit un délai de rétractation et un délai de réflexion de 10 jours.

Le délai de rétractation permet à l’acquéreur déjà lié contractuellement (c’est-à-dire qui a signé l’acte) de revenir sur son engagement alors que le délai de réflexion interdit provisoirement de s’engager. Le délai de rétractation concerne les avants contrats alors que le délai de réflexion concerne le cas particulier de l’acte authentique de vente non précédé d’un avant contrat.

Pour que le délai commence à courir, il est nécessaire qu’une notification du contrat soit faite. La forme de la notification peut se faire par :

  • Lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai commencera à courir le lendemain de la première présentation. Le délai expirant un jour samedi, un dimanche ou un jour férié doit être prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (Cour de cassation, chambre civile 3, 5 décembre 2007, N° de pourvoi : 06-19567).
  • Remise en main propre. La date de remise est attestée dans l’acte lui-même. Le délai court le lendemain de la date de la remise.

III – Sanction du non-respect du délai

Aucune sanction n’est prévue par les textes en cas de non-respect des articles L.271-1 et L.271-2 du Code de la construction et de l’habitation. Toutefois, vraisemblablement le non-respect des règles afférentes au délai de rétractation ou de réflexion pourrait remettre en cause la vente dans le cas où l’acquéreur demanderait au tribunal la nullité sur le fondement du non-respect des dispositions impératives de protection de son consentement. Il est donc du plus grand intérêt pour le vendeur que ce délai soit purgé.

Estelle FORNIER

Avocats à la Cour

La gestion des ordures ménagères est une source de litige fréquente de la part des copropriétaires et peut même parfois devenir une source de contentieux. Lorsque l’on est exploitant d’un commerce, la question la plus fréquente concerne l’utilisation des containers poubelles communs de la copropriété.

Pour mémoire, les dispositions relatives aux déchets dans les copropriétés se trouvent d’une part dans le code de la construction et de l’habitation (CCH) et d’autre part dans le règlement sanitaire départemental reprit très largement par le règlement sanitaire de la ville de Paris.

 

Ainsi, l’article R111-3 du Code de la construction et de l’habitation dispose dans son dernier alinéa que « Les immeubles collectifs comportent un local clos et ventilé pour le dépôt des ordures ménagères avant leur enlèvement »

Par ailleurs, l’article 77 du règlement sanitaire départemental type intitulé « Emplacement des récipients à ordures ménagères », repris par celui de la Ville de Paris, précise de façon très détaillée les caractéristiques des locaux poubelles (voir annexe). La lecture de cet article permet donc de tirer trois conséquences principales :

  • Il est interdit d’entreposer des containers dans les couloirs et cages d’escaliers en raison des dangers encourus en termes d’hygiène et de sécurité notamment de sécurité incendie.
  • Les containers peuvent être entreposés dans la cour de l’immeuble en cas de disposition des lieux ne permettant pas une autre organisation.
  • Il n’est pas interdit d’entreposer des containers dans des locaux qui seraient situés en sous-sol si les locaux sont convenablement ventilés.

Ces textes ne donnant pas de réponse concrète sur la gestion des déchets des commerces, il est nécessaire de savoir si les locaux commerciaux ou professionnels doivent posséder leurs propres containers et locaux. En effet, il est fréquent d’entendre que les commerçants ne peuvent pas jeter leurs ordures dans les mêmes containers et/ou locaux que les copropriétaires personnes physiques. Cette confusion vient du fait que les containers ont pour vocation de recevoir les ordures ménagères. Les déchets issus d’un commerce peuvent-ils être qualifiés d’ordures ménagères ? Le règlement sanitaire départemental ne fait pas cette distinction entre les ordures des copropriétaires commerçants et non-commerçants.

Les ordures ménagères sont définies de manières négatives par l’article 74 du règlement sanitaire départemental qui dispose que :

« Les déchets ménagers présentés au service de collecte ne doivent contenir aucun produit ou objet susceptible d’exploser, d’enflammer les détritus ou d’altérer les récipients, de blesser les préposés chargés de l’enlèvement des déchets, de constituer des dangers ou une impossibilité pratique pour leur collecte ou leur traitement. 

Les détritus à arêtes coupantes doivent être préalablement enveloppés. 

Il est interdit de mélanger aux ordures ménagères, les déchets anatomiques ou infectieux des établissements hospitaliers ou assimilés ainsi que les déchets issus d’abattage professionnel. 

Il est également interdit de déposer dans les récipients destinés à la collecte des ordures ménagères des substances toxiques et notamment pharmaceutiques ou radio-actives, solides ou liquides, susceptibles de constituer un danger ou une cause d’insalubrité. »

A noter également que l’annexe I de la convention collective des gardiens, concierges et employés d’immeubles ne distingue pas non plus de règle particulière en ce qui concerne le traitement des déchets. Au contraire, l’article « Définition et évaluation des tâches en unités de valeur pour le personnel visé à l’article 18, paragraphe B, de la présente convention » prévoit que :

« Le local principal retenu ci-après comme élément de référence pour l’attribution des « unités de valeur » de tâches s’entend de chaque local à usage commercial, professionnel ou d’habitation […] ».

De plus, l’article III. a) « Propreté et entretien des parties communes – Ordures ménagères » ne fait aucunement mention de la provenance des ordures ménagères :

« Remplacement des poubelles sous les orifices des gaines et ordures et manipulation des poubelles pour mise à la disposition des services chargés de la collecte des ordures ménagères, dans le cadre de la réglementation en vigueur. Nettoyage des poubelles, des locaux les abritant et du matériel ……….[NUV (*) : 25 par local principal.]

Débouchage des gaines et vide-ordures. Dans la mesure où cette tâche n’est pas contractuelle, elle ne peut être imposée au salarié ……….[NUV (*) : 5 par local principal.] ».

La seule exclusion prévue par la convention collective concerne l’enlèvement des gravats ou déchets en cas de travaux :

« Pendant et après les travaux, l’enlèvement des gravats ou déchets et le nettoyage du chantier comme des parties communes de l’immeuble incombent exclusivement à l’entreprise ou au particulier concernés et ne peuvent être imposés au gardien, concierge ou employé d’immeubles ».

A la lecture de ces articles, il apparaît que des déchets qui proviennent des commerces peuvent parfaitement être définis comme des déchets ménagers y compris s’il s’agit d’un restaurant. Les commerçants n’ont donc aucune obligation d’utiliser des containers qui leur sont propres.

 

A noter que dans le cadre de la copropriété, le principe qui est fixé par la jurisprudence est celui de l’égalité entre les copropriétaires. La Cour de cassation (Cour de cassation, 3ème chambre, 11 mars 2009, n°08-10566) a déjà jugé que l’interdiction pour un commerçant d’utiliser les parties communes à usage de poubelles pour mettre ses déchets entraine une rupture d’égalité entre les copropriétaires dans la jouissance d’une partie commune. En conséquence, cet arrêt décide donc que l’assemblée ne peut pas interdire à un copropriétaire, un restaurateur en l’espèce, d’entreposer ses conteneurs – même privés – de déchets dans le local affecté à cet usage au prétexte qu’il les encombre. Il est intéressant de noter que la Cour de cassation, à la différence de ce qu’avait indiqué la Cour d’appel, ne tient pas compte de la taille des conteneurs des commerçants et par conséquent de l’encombrement du local par ces conteneurs privés.

Toutefois, il ne faudra pas oublier la règle essentielle contenue généralement dans les règlements de copropriété à savoir qu’il est interdit d’encombrer les parties communes. Il a été notamment jugé par la cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 15 novembre 2007, que « des copropriétaires commerçants ne peuvent pas utiliser des parties communes pour y entreposer leur matériel ou leurs marchandises ou pour y stocker leurs containers de déchets. » En cas d’usage abusif des parties communes, le syndicat est fondé à demander la cessation par le copropriétaire de l’occupation indue ainsi que des dommages intérêts en réparation du préjudice causé (Cour d’appel de Paris, 25 janvier 2007).

 

A notre sens, il nous apparaît que soit le syndicat des copropriétaires met à disposition un emplacement spécifique pour les containers des commerces soit les commerçants peuvent utiliser les containers et/ou les locaux communs.

Estelle FORNIER 

Avocats à la Cour

Il peut arriver que, dans le cadre d’un bail commercial, le preneur cesse de payer ses loyers. Le plus souvent, cela est la conséquence de difficultés financières rencontrées par le preneur dans le cadre de son activité. Il faudra alors agir le plus rapidement possible afin d’obtenir une décision du Tribunal avant l’éventuelle mise sous sauvegarde, ou mise en redressement ou liquidation judiciaire du locataire défaillant. En effet, le jugement ouvrant une procédure collective interrompt ou interdit toute action en justice de la part des créanciers dont la créance est née avant le jugement et tendant à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent. Cette règle dite de la suspension des poursuites individuelles s’applique au bailleur, bien que celui-ci dispose d’un privilège en vertu des article L 641-12, L 641-13 et L 622-16 du code de commerce.

Plusieurs étapes doivent être respectées afin d’obtenir une ordonnance permettant d’expulser le preneur.

  • Etape 1 : Démarches amiables

Il est tout d’abord conseillé, à défaut de paiement d’un terme de loyer et/ou charges à échéance, d’envoyer une relance à son locataire et, si celle-ci reste sans réponse, une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception demandant au preneur de payer les sommes dues au titre du bail à savoir le loyer et les charges. Un délai à courte échéance (ex. : 8 jours) sera fixé dans ce courrier.

Nous attirons votre attention sur le fait que depuis la loi PINEL, l’article L 145-16-1 du code de commerce prévoit que lorsque la cession d’un droit au bail ou d’un fonds de commerce s’accompagne d’une clause de garantie aux termes de laquelle le cédant se porte caution solidaire du paiement du loyer par le cessionnaire, ce qui est le cas dans la majorité des cas, le bailleur est tenu d’informer le cédant du défaut de paiement du loyer par le locataire cessionnaire « dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle le paiement aurait dû être acquitté ».

De même, lorsque ce cautionnement est contracté par une personne physique (ex ; caution du gérant de la société locataire), celle-ci est informée par le créancier de l’évolution du montant de la créance garantie et de ces accessoires au moins annuellement à la date convenue entre les parties ou, à défaut, à la date anniversaire du contrat, sous peine de déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités (article 2293 du code civil).

Par conséquent, il convient d’être particulièrement vigilant et de dénoncer la défaillance du locataire à la caution dans les délais légaux, sous peine de ne pouvoir pas exercer ses droits auprès d’elle.

  • Etape 2 : Phase obligatoire en cas de clause résolutoire

Dans le cas où aucun échéancier raisonnable n’aurait été proposé ou qu’aucun paiement des sommes dues n’aurait été effectué, il est nécessaire de faire signifier par voie d’huissier un commandement de payer les loyers et ses accessoires visant la clause résolutoire du bail, conformément à l’article L 145-41 du code de commerce.

En cas de non-paiement total des sommes dues à l’expiration d’un délai d’un mois, le preneur est réputé sans droit ni titre.

  • Etape 3 : Procédure judiciaire

Il faudra ensuite assigner le preneur en référé-expulsion ou au fond par devant le Tribunal de grande instance du lieu de situation de l’immeuble en application de l’article R.211-4 du Code de commerce.

Cette assignation devra être dénoncée par huissier aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce, sous peine d’irrecevabilité de l’action (article L 143-2 du code de commerce). A noter que le jugement ne peut intervenir qu’après un mois écoulé depuis la notification, il est donc conseillé de dénoncer aux créanciers ladite assignation le plus tôt possible et de prendre en compte cette contrainte dans le choix de la date d’audience.

Il sera également souligné que le preneur pourra faire des demandes de délai de paiement dans la limite de deux années en application de l’article 1343-5 du Code civil. En outre, sur le fondement de l’article L 145-41 alinéa 2 du code de commerce, en accordant des délais, le juge peut suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. Ainsi, la clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Si le juge ne fait pas droit à cette demande et que vos prétentions sont fondées, le Tribunal rendra une décision vous autorisant à expulser votre locataire qui devra être signifiée par acte d’huissier à votre locataire.

En cas d’ordonnance rendue par le juge des référés, le locataire disposera d’un délai de 15 jours pour interjeter appel. Ce délai est d’un mois en cas de jugement.  La décision devenue définitive ne pourra être remise en cause ultérieurement.

  • Etape 4 : Exécution de la décision judiciaire

Cette phase de l’expulsion n’est pas la plus simple et nécessite le respect d’un formalisme et de délais particuliers.

Un commandement de quitter les lieux devra être signifié à l’occupant. Celui-ci prend effet immédiatement. Toutefois, le locataire pourra saisir le juge de l’exécution du Tribunal de grande instance afin de demander un délai de grâce.

Dans le cas où aucun délai n’aurait été accordé et que le preneur refuse de quitter les lieux, il est nécessaire de demander le concours de la force publique. La préfecture de police dispose d’un délai de deux mois pour répondre. Le silence gardé pendant deux mois équivaut à un refus.

Quand le concours de la force publique est accordé, l’huissier de justice accompagné de policiers et d’un serrurier pourra procéder à l’expulsion. Il est à noter que la trêve hivernale n’a pas lieu de s’appliquer dans ce cas car il ne s’agit pas d’une habitation. En l’absence d’autorisation de recours à la force publique, le bailleur n’aura d’autre choix que mettre en cause la responsabilité de l’état.

Après que les locaux aient été libérés de toutes personnes, l’huissier apposera des scellés et dressera un procès-verbal d’expulsion reprenant l’ensemble des démarches effectuées qui sera signifié à la personne expulsée.

Vous pourrez alors utiliser à nouveau vos locaux comme bon vous semble.

Estelle FORNIER

Avocats à la Cour

Le bail commercial, dont le statut est codifié dans le code de commerce, répond à une logique propre et déroge ainsi à de très nombreuses dispositions du Code civil selon l’adage « La loi spéciale déroge à la loi générale ».  Preuve en est les règles particulières applicables à l’extinction de ce contrat.

En effet, la date d’expiration du bail commercial n’entraîne pas son extinction et il ne cesse donc pas de plein droit. Les deux premiers alinéas de l’article L.145-9 du Code de commerce disposent que :

« Par dérogation aux articles 1736 et 1737 du code civil, les baux de locaux soumis au présent chapitre ne cessent que par l’effet d’un congé donné six mois à l’avance ou d’une demande de renouvellement. A défaut de congé ou de demande de renouvellement, le bail fait par écrit se prolonge tacitement au-delà du terme fixé par le contrat. Au cours de la tacite prolongation, le congé doit être donné au moins six mois à l’avance et pour le dernier jour du trimestre civil. »

A la seule lecture de cet extrait, il apparait que la tacite prolongation est protectrice du Preneur puisqu’elle permet à ce que celui-ci bénéficie toujours de la protection du statut des baux commerciaux alors même qu’il serait sans titre. Le terme contractuel n’est donc pas extinctif. Cela entraîne deux conséquences principales :

  1. La possibilité pour le bailleur ou le preneur de mettre fin au bail moyennant un préavis de six mois

L’article L.145-9 du Code de commerce (alinéa 3) dispose que « A défaut de congé ou de demande de renouvellement, le bail fait par écrit se prolonge tacitement au-delà du terme fixé par le contrat. Au cours de la tacite prolongation, le congé doit être donné au moins six mois à l’avance et pour le dernier jour du trimestre civil. ». Il n’est pas précisé quelle est la partie qui peut donner congé. Cet article vise donc le preneur et le bailleur.

Toutefois, dans le cas où c’est le bailleur qui donne congé, il devra en principe verser une indemnité d’éviction qui devra couvrir l’intégralité du préjudice causé par le défaut de renouvellement, conformément aux dispositions de l’article L 145-14 du code de commerce, sauf exceptions visées à l’article L 145-17 du même code[1] .

  1. La prolongation tacite du bail commercial et le déplafonnement de droit du loyer

Il est important de lire également l’article L.145-34 du Code de commerce qui dispose que si le bail s’est prolongé au-delà de douze ans du fait d’une tacite prolongation, alors les dispositions protectrices liées au plafonnement du loyer n’ont plus vocation à s’appliquer. Cela signifie que le Bailleur pourra donc augmenter le loyer sans tenir compte de l’évolution de l’indice de référence stipulé dans le bail (ILC ou ILAT).

Il faut donc que le locataire soit extrêmement vigilant sur le renouvellement de son bail afin de ne pas être pris au piège de cette disposition au risque de se retrouver avec un loyer déplafonné. Cela est particulièrement dangereux quand la valeur locative est bien supérieure au loyer payé.

Les Preneurs ne doivent donc pas hésiter à consulter un avocat afin d’être certain de la date d’expiration et d’éviter une augmentation parfois très conséquente de leur loyer.

Conseil : Pour éviter la prolongation tacite du bail, il convient, pour le bailleur de donner congé avec offre de renouvellement et pour le preneur de demander le renouvellement du bail commercial (article L 145-9 alinéa 1 du code de commerce).

Estelle FORNIER

Avocats à la Cour

[1] Pour mémoire : le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d’aucune indemnité :

  • S’il justifie d’un motif grave et légitime à l’encontre du locataire sortant ;
  • S’il est établi que l’immeuble doit être totalement ou partiellement démoli comme étant en état d’insalubrité reconnue par l’autorité administrative ou s’il est établi qu’il ne peut plus être occupé sans danger en raison de son état.

Il n’est pas rare qu’un locataire ou propriétaire d’un bien soit gêné par le comportement de son voisin. Se pose alors la question de savoir ce qui est reconnu comme un trouble anormal de voisinage et que faire en cas de trouble avéré ?

« Nul ne peut causer à autrui des troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage » est un principe bien établi dans la jurisprudence des tribunaux. En effet, celui-ci est très ancien et a été consacré par la chambre civile de la Cour de cassation le 27 novembre 1844 à l’occasion d’une pollution industrielle[1].

Mais qu’est-ce que le trouble anormal de voisinage ? Le trouble anormal de voisinage (TAV) recoupe une multitude de situations très diverses. Il peut s’agir de :

  • La présence d’objet inadaptés et déplaisants ne répondant pas à la définition d’une clôture. En l’espèce, des sommiers avaient été placés comme clôture[2].
  • Nuisances sonores issues de travaux dans un immeuble voisin[3] ou encore d’aboiements, de bruits de talons, tapage nocturne issu d’un débit de boisson[4].
  • Une atteinte à l’esthétique de l’environnement. En l’espèce, le terrain avait été abimé par le retournement du sol et la création d’un talus ce qui contrastait avec l’harmonie de la ligne de crête et des champs[5].
  • Fumées de cheminée[6].
  • Diminution de la luminosité et de l’aération naturelle. [7] Ou, au contraire, augmentation de la luminosité[8].

Ces situations peuvent être une véritable source de troubles à laquelle la victime souhaite légitimement mettre un terme. Le délai nécessaire pour parvenir à une solution dépendra en grande partie de la bonne volonté des parties.

Il est conseillé de toujours privilégier une solution de dialogue afin de ne pas braquer les protagonistes et de parvenir rapidement à une solution. Dans certains cas, il pourra être réfléchi bilatéralement aux moyens d’atténuer le trouble et cela pourrait nécessiter d’engager des frais.

En cas d’échec, il faudra alors mettre votre voisin en demeure de cesser le trouble anormal de voisinage par lettre recommandée avec avis de réception. Dans ce courrier, il faudra détailler précisément les faits, les troubles qui en résultent et le préjudice que vous subissez.

Si votre voisin continue, vous n’aurez malheureusement pas d’autres choix que de rassembler des preuves à l’encontre de ce dernier. Il pourra s’agir de constats d’huissier[9], d’attestations concordantes d’autres voisins et de votre entourage (de préférence des amis), de procès-verbaux de mains-courantes ou de plaintes, d’articles de journaux, impression d’écran d’un évènement diffusé sur internet, etc.

Vous devrez ensuite saisir la juridiction civile compétente. Si vous demandez une obligation de faire[10] à savoir par exemple retirer une enseigne lumineuse ou des objets déplaisants, il faudra alors saisir le Tribunal de grande instance où vous aurez l’obligation d’être représenté par un avocat. Si vous ne demandez que des dommages-intérêts, le tribunal compétent dépendra de la somme demandée[11].

Il est bien nécessaire de retenir que plus votre dossier est complet, plus vous avez de chances d’emporter la conviction du juge. En aucun cas, un juge ne vous donnera raison sur votre seule parole et ce, même si vous êtes de bonne foi.

Estelle FORNIER

Avocats à la Cour

[1] GAJC, Dalloz 2000, 11e éd., n° 74-75 ; S. 1845. 1. 211

[2] Cour de cassation, 3ème civile, 19 novembre 2015, n°14-23342

[3] Cour d’appel de Paris, 2e ch., sect. A, 9 mai 2000

[4] Cour de cassation, 2ème civile, 15 mars 1972, n° de pourvoi : 70-13571

[5] Cour de cassation, 2e civ. 29 novembre 1995, n°93-18036

[6] Cour de cassation, 3ème civile, 22 novembre 2011, n° de pourvoi : 10-13635

[7] Cour de cassation, 3ème civile, 5 septembre 2012, n° de pourvoi : 10-27567

[8] Cour de cassation, 3ème civile, 9 novembre 1976, n° de pourvoi : 75-12777

[9] Attention des photos seules n’ont quasiment aucune valeur devant un Tribunal.

[10] Il s’agit alors d’affaires dont le montant est indéterminé.

[11] Juridiction de proximité pour un litige inférieur à 4 000 euros – Tribunal d’instance pour un litige compris entre 4 000 euros et 10 000 euros – Tribunal de grande instance si le litige est supérieur à 10 000 euros.

Nombre de propriétaires se trouvent confrontés à des locataires qui ne payent pas les loyers. Deux situations différentes sont fréquentes :

  • Un locataire, de bonne foi, rencontre temporairement une situation financière difficile. Dans ce cas, il en averti en principe le bailleur et il est recommandé de rattraper le retard de loyer via un échéancier qui sera négocié entre les deux parties. Ainsi, il est probable qu’en quelques mois tout soit rentré dans l’ordre. Si une des échéances n’est pas respectée, il conviendra de procéder à un commandement de payer par voie d’huissier afin de protéger vos droits.
  • Un locataire, de mauvaise foi, arrête de payer les loyers sans raison particulière. Le propriétaire ne devra pas se laisser abuser et devra se montrer ferme dès le premier manquement. Deux cas principaux :
    • Le propriétaire vient de donner un congé au locataire pour vendre ou habiter les locaux loués (Art.15 de la loi du 6 juillet 1989). Celui-ci en représailles cesse de payer les loyers. Le locataire essayera vraisemblablement de gagner du temps et vous fera miroiter un éventuel payement à venir ainsi qu’un départ. Dans ce cas, il est nécessaire d’agir tout de suite car la situation ne pourra que s’envenimer sur un plan financier et, pire encore, le locataire pourrait ne pas quitter les lieux ou quitter les lieux sans vous donner sa nouvelle adresse, ce qui compliquera les poursuites judiciaires.
    • Le propriétaire décide de ne pas payer les loyers car il n’en a pas envie ou n’en a plus les moyens mais ne propose aucune solution.

Légalement, il suffit d’un seul retard de paiement du loyer et/ou des charges pour constituer un impayé.

Dans un premier temps, une phase amiable sera privilégiée. Le propriétaire pourra mettre en demeure de payer par lettre recommandée avec accusé de réception le locataire. En cas d’échec, le propriétaire se rapprochera d’un huissier qui délivrera un commandement de payer visant la clause résolutoire (si le contrat de bail contient une clause résolutoire).

Pour mémoire, une clause résolutoire permet la résiliation automatique du contrat en cas de manquement à une obligation contractuelle par l’une des parties. Ainsi, lorsqu’une clause résolutoire est insérée dans le contrat de bail, le juge ne peut que constater la résiliation du bail deux mois après que le commandement de payer ait été signifié. Il est donc vivement recommandé aux bailleurs de veiller à insérer une telle clause dans le contrat de bail.

Si dans le délai de deux mois, aucun payement n’est intervenu, il sera nécessaire d’assigner le locataire par devant le Tribunal d’instance du lieu de situation de l’immeuble pour obtenir le paiement des sommes dues et l’expulsion du locataire indélicat. Bien que le code de procédure civile ne requière pas la représentation obligatoire par un avocat, il est tout de même fortement conseillé de s’entourer des services d’un conseil. En effet, l’argumentaire à développer et la procédure à respecter doivent répondre précisément à certaines règles. A défaut, la procédure ne sera pas valide et le juge rejettera les prétentions du propriétaire même si celles-ci sont réelles. Parallèlement à la procédure par devant le Tribunal d’instance, le Préfet ainsi que la CCAPEX[1] devront être informés. Entre la saisine du juge et l’obtention de la décision de justice, il s’écoule en général entre 6 et 12 mois.

Une fois le jugement obtenu, si votre ancien locataire n’exécute pas spontanément la décision, il sera nécessaire de recourir à un huissier afin de délivrer un commandement de quitter les lieux le cas échéant et procéder aux saisies qui s’imposent. Si besoin est le concours de la force publique sera requis.

Il peut arriver que soit refusé le concours de la force publique. Il s’agit alors d’une position très désagréable pour le propriétaire qui doit encore faire une démarche afin que l’Etat paye une indemnité égale aux loyer et charges dues par l’occupant sans droit, ni titre et ce, jusqu’à ce que celui-ci quitte les locaux.

Enfin, il est à noter que le dépôt de garantie a pour fonction de couvrir d’éventuels manquements du locataire (loyers ou charges impayés, réalisation des réparations locatives…). En aucun cas, il ne peut être utilisé par le locataire pour compenser les loyers impayés.

Estelle FORNIER

Avocats à la Cour

[1] Commissions départementales de coordination des actions de prévention des expulsions locatives.

Il arrive souvent qu’un locataire d’un lot de copropriété génère des nuisances. La question se pose de savoir comment mettre fin à celles-ci ?

Classiquement, il est possible d’assigner le propriétaire du lot sur le fondement de l’alinéa 1 de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965 qui dispose que « Chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble. » afin d’obtenir des dommages et intérêts. En cas de condamnation, le propriétaire du lot se retournera vraisemblablement contre son locataire, auteur du trouble.

Il est également possible d’assigner le propriétaire et le locataire afin d’obtenir directement la résiliation du contrat de bail et l’expulsion du locataire. Il s’agit là d’une action oblique qui est définie par l’article 1341-1 du Code civil comme suit : « Lorsque la carence du débiteur dans l’exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne. ».

Préalablement, il sera nécessaire que le syndic soit habilité à agir en justice par l’assemblée générale en application de l’article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967. A noter toutefois que si le défaut d’autorisation du syndic d’agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires constitue, lorsque cette autorisation est exigée, une irrégularité de fond, il résulte de l’article 121 du Code de procédure civile et de la jurisprudence constante que cette irrégularité peut être régularisée et que la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue (CA Nancy, 2ème chambre civile, 9 avril 2015, n°13/03512).

Pour que le syndicat des copropriétaires soit recevable et fondé à agir sur le fondement de l’action oblique, il est nécessaire de cumuler les conditions suivantes :

  1. D’une part, qu’il soit contrevenu tant au contrat de bail qu’au règlement de copropriété (I) ;
  2. D’autre part, qu’il existe une carence du copropriétaire bailleur (II) ;
  3. Enfin, que le locataire cause un préjudice aux autres copropriétaires (III)

I – La violation du contrat de bail et du règlement de copropriété

L’action oblique implique que le Syndicat des copropriétaires soit créancier envers le copropriétaire bailleur d’une obligation déterminée. Le syndicat des copropriétaires est créancier de l’obligation qu’a chaque copropriétaire de respecter le règlement de copropriété[1].

L’action oblique requiert également que le copropriétaire soit créancier d’une obligation envers son locataire. Dans ce type de situation, le copropriétaire bailleur est créancier de l’obligation qu’a son locataire de respecter les clauses du contrat de bail.

L’action oblique nécessite donc que le locataire en ne respectant pas les clauses de son bail ait, par la même occasion, contrevenu au règlement de copropriété.

Ainsi, un règlement de copropriété déclarant chaque copropriétaire responsable des agissements répréhensibles de ses locataires permet au syndicat des copropriétaires, en cas de carence du copropriétaire bailleur, d’exercer l’action en résiliation du bail dès lors que le locataire contrevient aux obligations découlant de celui-ci et que ses agissements qui causent un préjudice aux autres copropriétaires sont en outre contraires au règlement de copropriété (Cour de cassation, 3ème chambre, 14 novembre 1985, n°84-15577 ; Cour de cassation, 3ème chambre civile, 22 juin 2005, n°04-12540).

A noter que cette résiliation peut intervenir tant pour un bail commercial que pour un bail d’habitation. En pratique, l’usage des baux est que le contrat contient une clause qui fait obligation au locataire de respecter le règlement de copropriété. Dans ce cas, le règlement de copropriété est directement opposable au locataire et il n’y a donc aucune difficulté à ce que le Syndicat des copropriétaires soit recevable dans son action. Dans les contrats de location d’un local à usage d’habitation, c’est l’article 7 b de la loi du 6 juillet 1989 qui fait obligation au locataire de jouir paisiblement des lieux loués[2].

Enfin, on notera que le locataire ne peut s’exonérer du fait qu’il n’a pas eu connaissance du règlement de copropriété (Cour d’appel de Pau, 2ème chambre, 1ère section, 13 février 2014, n°12/04026). Le préjudice qui peut résulter de ce défaut d’information pourra avoir pour origine le défaut d’information par le bailleur qui a omis ou refusé de lui communiquer les extraits du règlement. Le locataire sera alors en droit de se retourner contre son bailleur mais cela ne prive pas le syndicat des copropriétaires de son action.

II – La carence du propriétaire bailleur

Le syndicat des copropriétaires doit avoir informé le copropriétaire bailleur de la violation du règlement de copropriété. Cette information se fera par des mises en demeures au copropriétaire mais aussi par des résolutions issues des procès-verbaux d’assemblées générales.

Sans aucune réaction de la part du bailleur, celui-ci sera considéré comme négligent puisque ne justifiant d’aucune diligence dans l’exercice des droits qu’il détient à l’encontre de son locataire.

Il a ainsi été jugé que la carence du copropriétaire bailleur est constituée lorsque :

  • Le bailleur s’est contenté de mettre en demeure le locataire de respecter le règlement de copropriété et de retirer son scooter des parties communes sans juger utile d’introduire à son encontre une action en expulsion (CA Nancy, 2ème chambre civile, 9 avril 2015, n°13/03512).
  • Le bailleur, qui a engagé à l’encontre de son locataire une procédure en résiliation du bail qui a été rejetée par le tribunal au motif que les troubles proviendraient pour une part importante des défauts de l’immeuble loué, n’a pas poursuivi cette instance en appel alors que les chances d’obtenir satisfaction par cette voie de recours n’étaient pas négligeables (Cour d’appel de Montpellier, 1ère chambre, section D, 4 juin 2014, n°12/02386).

Par conséquent, l’absence de procédure judiciaire engagée par le bailleur envers son locataire semple à considérer, de fait, comme une carence du copropriétaire.

III – Le préjudice du syndicat des copropriétaires

Le préjudice peut prendre différentes formes :

  • Troubles anormaux :
    • Odeurs nauséabondes,
    • Regroupement d’individus consommant bruyamment sur la voie publique,
    • Nuisances sonores. A ce sujet, il a été jugé que la vétusté de l’immeuble et l’absence d’isolation efficace ne sauraient en aucun cas légitimer des conditions de vie irrespectueuses du voisinage[3].
  • Dégradations et mauvais usage des parties communes :
    • Pénétration dans l’immeuble par la porte d’entrée avec le scooter qui est ensuite déposé dans le local poubelle occasionnant des dégradations de la peinture et de la plaque de protection de la porte[4];
    • Exercice d’une activité de carrosserie-peinture et modification des parties communes par le percement d’un mur-maître et le creusement d’une fosse de décantation sans autorisation de l’assemblée générale[5].

Les agissements pourront être démontrés par des pétitions, des mains courantes, des plaintes, des arrêtés de la mairie pour interdire par exemple la vente de boissons alcoolisées la nuit, des constats d’huissier, des résolutions d’assemblées générales, etc.

A noter qu’une action oblique ne peut prospérer à l’encontre d’un nouvel exploitant alors que les troubles sont le fait de l’exploitant précédent.

* * *

Lorsque l’ensemble de ces éléments sont réunis, les tribunaux peuvent prononcer la résiliation du contrat de bail, l’expulsion du locataire et le paiement de dommages et intérêts (Cour d’appel de Paris, 16ème chambre, Section B, 22 février 2007, n°06/00147).

Estelle FORNIER

Avocats à la Cour


[1] Cour d’appel de Montpellier, 1ère chambre, Section D, 4 juin 2013, n°12/02386

[2] Cour d’appel de Montpellier, 1ère chambre, section D, 4 juin 2014, n°12/02386

[3] Cour d’appel de Montpellier, 1ère chambre, section D, 4 juin 2014, n°12/02386

[4] CA Nancy, 2ème chambre civile, 9 avril 2015, n°13/03512

[5] Cour de cassation, 3ème chambre civile, 22 juin 2005, n°04-12540

Vous souhaitez ouvrir votre « boutique » et avoir pignon sur rue ? Vous avez consulté un certain nombre d’annonces et ne comprenez pas toutes les subtilités des termes employés sur celles-ci ? Nous répondrons dans cet article à certaines des questions les plus usuellement posées.

Après avoir défini le droit au bail (I) et le fonds de commerce (II), nous présenterons leurs principales différences (III).

Qu’est-ce que le droit au bail ?

Le droit au bail correspond au droit de bénéficier d’un bail commercial en cours, pour la durée restant à courir et dans des conditions identiques.

Le prix de cession sera payé par le locataire (=preneur) entrant au locataire sortant. Cette somme n’est en aucun cas perçue par le propriétaire des locaux (=bailleur). Nous vous conseillons toutefois de préciser, lors de votre offre, si le prix proposé inclut ou non le remboursement de dépôt de garantie au bailleur.

Plus le contrat de bail est favorable au locataire (faible loyer, charges peu élevées, durée restant à courir longue, etc) et l’emplacement des locaux intéressant, plus son prix sera élevé.

Qu’est-ce que le fonds de commerce ?

Le fonds de commerce est une entité plus complexe que le droit au bail. En effet, il est lui-même composé de plusieurs éléments dont le droit au bail fait partie. Ainsi, l’acquéreur d’un fonds de commerce achète non seulement le droit au bail mais également la clientèle, le matériel, les marchandises, l’enseigne, le nom commercial, les brevets d’invention, la marque de fabrique, les dessins et modèles industriels, les droits de propriété littéraire et artistique, les noms de domaine, adresses mails, etc.

Cependant, le stock n’est généralement pas compris dans la valeur du fonds et doit faire l’objet d’une évaluation distincte lors de la cession. Sont également exclus : les dettes, les créances, les biens immobiliers.

Pour certains petits commerces, le fonds de commerce comprend principalement le droit au bail et très peu d’autres éléments. C’est pourquoi, il peut parfois être difficile de les distinguer.

Ici aussi, le paiement est fait à l’ancien locataire et non pas au bailleur.

Droit au bail, fonds de commerce, quelles différences ?

Le prix : Pour un local identique, un droit au bail sera nécessairement moins élevé qu’un fonds de commerce, ce dernier englobant beaucoup plus d’éléments que le droit au bail. Cependant, il faut avoir en tête que l’acquisition d’un fonds de commerce, contrairement à l’acquisition d’un droit au bail, vous permet de reprendre une activité préexistante. La fixation du prix dépendra donc du chiffre d’affaires réalisé par le cédant sur les 3 derniers exercices auquel il sera affecté un pourcentage variable selon la branche d’activité. Plus ce chiffre est élevé, plus le prix de cession sera important. Ce n’est pas cette méthode de calcul qui sera appliquée en matière de cession de droit au bail. En effet, dans ce cas, la valeur d’un droit au bail est plus compliquée à établir, il convient de prendre en compte plusieurs éléments : la valeur locative de marché, le montant du loyer théorique de renouvellement, le nombre d’années restant à courir, la destination du bail…

L’autorisation préalable du bailleur : la cession de droit au bail peut être interdite par le bailleur. Cette interdiction figurera dans le contrat de bail. En revanche, il est impossible pour le bailleur d’interdire la vente d’un fonds de commerce, il s’agit d’une règle d’ordre public à laquelle on ne peut pas déroger. Il est toutefois précisé que les deux formes de cessions peuvent être soumises à l’agrément du bailleur ou à un formalisme particulier. Il faudra donc, préalablement à la signature de tout acte, prendre attentivement connaissance du bail.

Les formalités : la cession d’un droit au bail et la vente d’un fonds de commerce entraînent des formalités différentes que celles-ci soient liées à la fiscalité, à la publication, à la rédaction du contrat, etc. Il est donc recommandé de se faire accompagner par un avocat pour l’une ou l’autre de ces opérations afin d’une part de comprendre ce à quoi vous êtes engagé et d’autre part afin de préserver au mieux vos droits, une négociation étant toujours possible avec le cédant mais également avec le bailleur sur certains points.

Estelle FORNIER

Avocats à la Cour

Si vous avez régulièrement (congé + état des lieux contradictoire) quitté les locaux d’habitation que vous louiez et que votre ancien propriétaire refuse de vous restituer le dépôt de garantie pour des motifs fallacieux alors que le délai de restitution est dépassé, il est nécessaire de rédiger tout d’abord un courrier simple de relance puis un courrier de mise en demeure.

Dans ces courriers, nous vous recommandons de :

  • Bien mentionner le contrat de location pour lequel vous sollicitez la restitution du dépôt de garantie, en précisant sa date de conclusion et l’adresse des locaux loués,
  • Faire référence à votre congé et à la date de fin du bail,
  • Préciser la date de réalisation de l’état des lieux et la restitution des clés ;
  • Rappeler le paragraphe 7 de l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 : « A défaut de restitution dans les délais prévus, le dépôt de garantie restant dû au locataire est majoré d’une somme égale à 10 % du loyer mensuel en principal, pour chaque période mensuelle commencée en retard. Cette majoration n’est pas due lorsque l’origine du défaut de restitution dans les délais résulte de l’absence de transmission par le locataire de l’adresse de son nouveau domicile ».

Le second courrier devra faire mention de l’absence de réponse à votre premier courrier et enjoindre au bailleur de vous rembourser le dépôt de garantie dans un délai déterminé. Par ailleurs, concernant le formalisme, cette mise en demeure devra être adressée par lettre recommandée avec avis de réception. Pour la bonne tenue de votre dossier, nous vous conseillons de conserver précieusement une photocopie de chacun des courriers envoyés ainsi que les accusés de réception.

Si le propriétaire refuse toujours de vous restituer le dépôt de garantie, deux types de procédures simples seront envisageables devant la juridiction de proximité du ressort de l’immeuble objet de votre ancien bail :

  • Procédure en injonction de payer

Il s’agit d’une procédure simplifiée non contradictoire.

Il convient de remplir le formulaire n° Cerfa n°12947*03. La juridiction de proximité, si elle fait droit à votre demande, rendra une ordonnance qu’il conviendra de faire signifier par un huissier de justice.

A partir de la date de signification, le bailleur disposera d’un délai de 30 jours pour s’opposer à cette ordonnance, à défaut, vous pourrez obtenir de la juridiction de proximité un titre exécutoire et faire exécuter celle-ci.

  • Saisine de la juridiction de proximité par voie de déclaration

Il s’agit d’une procédure au fond contradictoire.

Il est nécessaire de faire une déclaration au greffe via le formulaire cerfa n°12285*07.

Vous-même et votre ancien propriétaire serez convoqués dans les mois qui suivent. Puis le juge rédigera un jugement qui permettra de recourir à un huissier afin d’exécuter le jugement à l’égard de votre ancien propriétaire dans le cas où il refuserait de payer spontanément la condamnation.

Dans les deux cas, n’oubliez pas de :

  • Demander non seulement le dépôt de garantie mais également la majoration prévue au paragraphe 7 de l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 ainsi que les dépens (très important pour que les éventuels frais d’huissier soient remboursés) ;
  • Joindre les photocopies du contrat de bail, des états des lieux, des courriers que vous avez envoyés au propriétaire avec les accusés de réception de ces courriers et le cas échéant les réponses du bailleur.

Estelle FORNIER

Avocats à la Cour

Ces deux actes sont des avants contrats qui précèdent la vente d’un bien. Ils présentent l’avantage d’introduire des conditions suspensives et donc de laisser un délai (trois mois en général) permettant de purger les incertitudes liées à la vente d’un bien immobilier (exemple : obtention d’un crédit, droit de préemption de la commune et du locataire le cas échéant ou encore purger le délai de rétractation[1]). Toutefois, bien qu’ils puissent sembler très proches, ils présentent en réalité des différences.

Promesse de vente (=promesse unilatérale de vente) Compromis de vente (=promesse synallagmatique de vente)
Textes légaux Art. 1124 et 1221 du Code civil Article 1589 al.1 du Code Civil
Objet Le propriétaire (le promettant) s’engage auprès du candidat acheteur (le bénéficiaire) à lui vendre son bien à un prix déterminé. Une seule partie s’engage donc. C’est le bénéficiaire qui décidera de la formation de la vente en levant l’option ou non, c’est-à-dire en décidant d’acquérir ou non. Il devra ainsi manifester ultérieurement sa volonté. Le propriétaire (le promettant) et l’acheteur (le bénéficiaire) s’engagent à conclure la vente du bien à un prix déterminé. Chaque partie prend un engagement envers l’autre.

La frontière est ténue entre la promesse synallagmatique de vente et la vente car les consentements réciproques ont été donnés et constatés. La promesse synallagmatique de vente est donc fréquemment présentée comme une vente sous condition suspensive.

Effets du contrat Seul le propriétaire est engagé. Le propriétaire et l’acheteur sont engagés.
Contrepartie En général, le candidat acquéreur verse une indemnité d’immobilisation à hauteur de 10% du prix du bien qui est due au promettant en cas d’absence de levée d’option par le bénéficiaire[2]. Une indemnité d’immobilisation (dépôt de garantie) d’un montant compris entre 5 et 10% du prix de vente est demandé à l’acquéreur et due en cas de défaillance de l’une ou l’autre des parties dans la signature de l’acte définitif malgré la levée des conditions suspensives.
Sanction Si le candidat acquéreur lève l’option (=décide d’acquérir) alors le propriétaire est obligé de vendre le bien. A défaut, l’exécution forcée sera demandée par le candidat acquéreur par devant le Tribunal de grande instance[3]. Cette condamnation pourra être assortie de dommages et intérêts.

Si le candidat acquéreur n’acquiert pas le bien, l’indemnité d’immobilisation reste acquise au propriétaire.

A noter qu’en cas de contrat conclu en violation d’une promesse, la sanction est la nullité de l’acte frauduleux la simple preuve de la connaissance qu’avait le tiers de l’existence de la promesse suffit pour demander la nullité[4].

Si l’une des parties renonce à la transaction, elle pourra :

 

·         Soit y être forcée par l’autre après avoir obtenu une décision de justice définitive en ce sens. Des dommages et intérêts pourront également être octroyés à la partie demanderesse.

 

·         Soit payer la clause pénale (10% du prix généralement).

 

 

Formalités administratives Enregistrement auprès de la recette des impôts dans les 10 jours qui suivent la signature.

Si la durée de la promesse est supérieure à 18 mois alors elle doit être conclue par acte authentique[5].

 

Si cette formalité n’est pas effectuée, la promesse est considérée comme nulle.

L’enregistrement n’est pas nécessaire.
Cout 125 euros pour l’enregistrement. 0 euros.
Avantage pour le bénéficiaire La promesse unilatérale permet au bénéficiaire de se ménager une période de réflexion pour décider de l’opération. La promesse synallagmatique convient au promettant et au bénéficiaire qui souhaitent constater une vente sur les conditions de laquelle elles sont d’accord et dont elles souhaitent que la bonne fin ne dépende plus d’une manifestation de volonté ultérieure de l’une d’elle.
Avantage pour le promettant Le bénéficiaire lève l’option lorsqu’il est certain que la vente est réalisable. En conséquence, une fois l’option levée, le promettant est lui aussi certain que la vente se réalisera. Ce contrat apporte donc une sécurité au promettant puisqu’il écarte le risque d’une inexécution de la vente.
Conditions de fond Le consentement et la capacité des parties sont requis. Les deux parties doivent avoir la capacité de vendre et d’acquérir[6]. Les parties doivent également avoir le pouvoir de contracter la vente[7].
Condition de forme La forme écrite est requise afin de se ménager une preuve de la promesse. En effet, la preuve des actes juridiques d’une somme ou d’une valeur supérieure à 1 500 euros doit résulter d’un écrit[8]. Par ailleurs, les nombreuses obligations légales qui pèsent sur le vendeur imposent ce formalisme.

L’écrit pourra être un acte notarié ou un acte sous seing privé[9].

Sort du contrat en cas de décès Le décès du promettant survenant après la signature de la promesse n’affecte pas les liens contractuels. Les obligations du promettant sont transmise à son ou ses héritiers et le bénéficiaire conserve dans des conditions inchangées la possibilité de lever l’option et de former la vente[10].

Le décès du bénéficiaire survenant avant la levée d’option est sans incidence sur la promesse et il appartient aux héritiers de celui-ci de décider de lever l’option ou de ne pas le faire.

Le décès du promettant entraîne la transmission de ses obligations à ses héritiers. Les juridictions judiciaires décident de conclure la vente du bien immobilier en raison de la présence d’héritiers (peu importe leur âge, aucune autorisation spéciale n’étant requise si ces derniers sont mineurs).

En cas de décès du bénéficiaire, les héritiers appelés à la succession qui l’acceptent sont censés continuer la personne du défunt. Ainsi, sauf volonté contraire exprimée ou de la nature des actes concernés, les successeurs sont tenus d’honorer les engagements pris par le proche décédé.

 

Sort du contrat en cas d’incapacité L’incapacité[11] du promettant survenant après la signature de la promesse est sans incidence[12].

L’incapacité du bénéficiaire avant la levée de l’option n’a aucune incidence car la levée de l’option appartiendra selon les cas soit au majeur assisté ou non soit à son tuteur.

L’incapacité du promettant ou du bénéficiaire survenant après la signature n’a aucune importance, l’échange des consentements ayant déjà eu lieu. La vente sera donc réitérée.
Transmission entre vifs Une promesse unilatérale ou un compromis de vente peut être transférée par le bénéficiaire soit par cession, soit par substitution d’un tiers dans ses droits.

Estelle FORNIER

Avocat à la Cour

[1] Seul l’acquéreur non professionnel d’un bien destiné à l’habitation bénéficie de ce délai de rétractation en application de l’article L.271-1 du code de la construction et de l’habitation. Il est de dix jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l’acte ou de la remise en main propre par un intermédiaire professionnel (agent immobilier, avocat, notaire).

[2] Il est important que le montant de l’indemnité d’immobilisation ne soit pas trop élevée car sinon la promesse unilatérale pourrait être requalifiée en promesse synallagmatique (Cour de cassation, chambre commerciale, 13 février 1978, n°76-13429)

[3] Article 1221 du Code civil : « Le créancier d’une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l’exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s’il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur et son intérêt pour le créancier. »

[4] Alinéa 3 de l’article 1124 du Code civil : « Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l’existence est nul. »

[5] Seulement dans le cas où le vendeur est un particulier (Cour de cassation, chambre civile 3, 18 février 2015, 14-14.416)

[6] Acte de disposition : Actes qui engagent le patrimoine d’une personne, pour le présent ou l’avenir (exemple : vente d’un immeuble, conclusion d’un emprunt, donation). Ces actes graves entraînent une transmission de droits qui peuvent diminuer la valeur du patrimoine.

[7] Par exemple, un vendeur marié ne peut vendre sans l’accord de son conjoint l’immeuble qui constitue le logement de la famille ou qui dépend de la communauté de biens existant entre les époux.

[8] En application de l’article 1341 du Code civil et du décret du 15 juillet 1980 n°80-533.

[9] Exception : toute promesse de vente d’une durée de plus de 18 mois (durée initialement prévue ou consécutive à une prolongation) doit être conclue par acte notarié si le vendeur est une personne physique et l’acquéreur un professionnel. A défaut, la promesse de vente est nulle.

[10] Cour de cassation, chambre civile 3, 8 septembre 2010, N°09-13345

[11] Les personnes incapables sont les mineurs et les majeurs protégés.

[12] Cour de cassation, chambre civile 3, 7 janvier 1982, n°80-14396